Témoignage d’un travailleur
« Je suis ouvrier dans une grande entreprise d’imprimerie et de papeterie de la zone industrielle de Koumassi. J’habite avec ma femme dans une maison à Gonzagueville (un bidonville). Le salaire ne suffisant pas pour boucler le mois, je me suis lancé à fond dans les heures supplémentaires. Malgré cela, mes fins de mois restaient toujours difficiles. Alors, comme bien des travailleurs, tout en gardant mon boulot dans l’entreprise, je me suis lancé depuis un peu plus de deux ans dans l’auto-entrepreneuriat en contractant un prêt à la banque pour ouvrir un bistrot. J’avais cinq ans pour rembourser ce prêt.
J’ai dû me lancer à fond dans les heures supplémentaires pour booster mon revenu. Mais quelques mois après, les choses ont commencé à se compliquer. Une nouvelle direction a pris le contrôle de l’entreprise et a mis fin aux heures supplémentaires. Entre temps, j’ai eu deux enfants et ma petite famille a grandi. Ma petite affaire n’a pas marché comme je le souhaitais et le prêt que j’avais contracté auprès de la banque est parti dans les dépenses de la vie courante, les frais de maternité, les couches et les biberons de mes enfants, etc.
Aujourd’hui, j’abime ma santé physique et mentale au boulot pour le remboursement des trois ans de traites restantes. La banque me laisse entre 40 et 60 mille francs sur ma paie mensuelle, même pas de quoi tenir le mois. De difficiles, mes fins de mois sont devenues impossibles. J’arrive à peine à payer mon loyer. J’ai l’intention de retourner dans ma famille, le temps de voir les choses venir ».
C’est une illustration de l’aggravation générale des conditions d’existence de la classe ouvrière. De nombreux travailleurs essaient de s’en sortir en se lançant dans ce genre d’affaire. Les capitalistes sont d’autant plus voraces que le gouvernement les y encourage et que les réactions de la classe ouvrière sont loin d’être suffisantes pour menacer leurs affaires. Il y a des grèves et des arrêts de travail, notamment dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, mais tant que ces luttes resteront isolées elles ne permettront pas de changer le rapport de force entre la classe ouvrière et le patronat épaulé par l’État. Mais lorsque la colère des travailleurs et de leurs familles éclatera sur leurs lieux de travail et dans la rue, on verra si le patronat et le gouvernement continueront à les traiter avec autant d’arrogance et de mépris. Ce n’est que par leurs luttes que les travailleurs parviendront à arracher des améliorations pour leurs conditions d’existence.