Éditorial

Centrafrique : pris dans le bourbier, Hollande appelle l’ONU à la rescousse

13 février 2014

Le 22ème sommet de l’Union Africaine (U.A) s’est tenu à Addis Abeba du 30 au 31 janvier. A la demande de la France, il s’est surtout penché sur la situation catastrophique en Centrafrique. A l’issue des travaux, il a été décidé de renforcer les troupes de la Misca, (la force africaine de la paix) et de prélever des fonds pour aider au rétablissement de la sécurité.

De son côté, le Conseil de sécurité de l’ONU a donné, le 28 janvier, son accord pour y envoyer une force européenne afin d’épauler les troupes françaises (la France ayant crié au secours) et la Misca à Bangui. Le gouvernement français voudrait bien que les autres pays européens lui viennent en aide, en argent ou en lui envoyant des soldats mais sous son commandement, ce que refuse par exemple l’Allemagne.

Le gouvernement français demande donc plus d’argent et plus de soldats. Pour quoi faire ? Loin de mettre fin à la violence des bandes armées qui terrorisent les populations, les troupes françaises ne font que de l' »interposition », c’est-à-dire qu’elles n’interviennent pas pour désarmer les bandes armées et mettre fin à leurs violences envers les populations mais seulement pour faire de la « dissuasion ». Cela rappelle beaucoup les pratiques des casques bleus de l’ONU lors de la guerre civile en Côte d’Ivoire. Ils ne faisaient que regarder les massacres s’opérer devant eux sans secourir les populations victimes.

C’est ainsi qu’en Centrafrique, alors que les soldats français sont en place depuis longtemps et sont armés jusqu’aux dents, ils assistent presque les bras croisés à des tueries, des massacres et des pillages sans lever le petit doigt ; c’est ainsi aussi que dans l’indifférence totale, ils laissent crever de faim, de soif et de manque de médicaments, des réfugiés qui ont trouvé refuge dans un terrain vague, près de l’aéroport, non loin du lieu où s’est établi le contingent des troupes françaises.

La nouvelle présidente, Catherine Panza a cru que, en lançant un appel à la « réconciliation » et en mettant en garde les miliciens des deux bords, son message allait être entendu. Force est de constater que la situation ne fait plutôt que s’empirer. Car lorsque le sang a coulé ; lorsque les gens n’ont pas encore fini d’enterrer leurs morts, de les pleurer ; et que les rancœurs et l’esprit de vengeance animent encore les cœurs, il est difficile demander aux populations de pardonner, et de se réconcilier.

A Bangui, c’est toujours le chaos. Des miliciens, du nom de « anti-balaka », partisans du président déchu Bozizé et des ex-Seleca, rebelles favorables à Djotodia, président démissionnaire, continuent de s’affronter, même si ces affrontements ont diminué d’intensité. Tous les jours, on découvre de nouveaux cadavres ; les exactions et les pillages continuent ;

des populations continuent de fuir vers des camps des déplacés ou vers des pays voisins, le Tchad surtout. L’éloignement des troupes de l’ex-Selaca des deux casernes de Bangui où ils étaient consignés vers une autre caserne, n’a rien changé à la situation.

En province, des éléments de l’ex-Seleca, qui ont fui Bangui avec leurs armes, sèment la terreur et la mort. Ils se sont emparés de trois villes : Sibut, à 180 km de Bangui, Berbérati, à l’Ouest et Bocaranga, au Nord-ouest. Ainsi, l’insécurité qui régnait à Bangui a gagné l’intérieur du pays : tueries, pillages, exactions, viols. Les populations de ces villes ont commencé à fuir, les unes vers la brousse, les autres vers les institutions religieuses.

Des troupes françaises, derrière son sillage les soldats de la Misca, ont quitté Bangui pour la province pour faire croire que c’est pour affronter les ex-Seleca. Loin de faire régner la paix, les troupes françaises ne font que s’enfoncer, chaque jour un peu plus, dans le bourbier centrafricain.

Que des gens continuent de mourir, que des milliers de personnes ont fui ou continuent de fuir, ce n’est pas le souci des dirigeants français. Ce qui compte pour eux, c’est d’être présent (depuis des dizaines d’années) en Centrafrique pour permettre à leurs capitalistes d’exploiter les ressources naturelles et d’exploiter la main d’œuvre locale.