Éditorial

Mali : la démagogie nationaliste des putschistes ne doit pas cacher leur véritable nature dictatoriale

02 juin 2022

ÉDITORIAL

 

Les colonels putschistes au pouvoir à Bamako depuis le renversement du président Ibrahim Boubakar Keïta, continuent d’entretenir une certaine démagogie nationaliste anti française, anti Cédéao, notamment depuis l’embargo décidé le 9 janvier 2022 par les dirigeants de la Cédéao avec l’appui du président français Macron.

Les sanctions économiques et la fermeture de frontières sont soi-disant destinées à punir le régime dit de transition du colonel Assimi Goïta, mais les premières victimes sont les populations pauvres. L’embargo a aggravé la crise économique, le coup de la vie a fait un bond suite à la pénurie des marchandises importées. Au final, même les prix des denrées produites localement ont suivi la hausse, mais le gouvernement au lieu de s’en prendre aux grossistes et aux importateurs qui profitent de la situation pour faire de grosses marges, cherche des boucs émissaires du côté des petits commerçants.

Grâce à leurs discours nationalistes, les putschistes ont réussi jusqu’ici à se maintenir au pouvoir en entrainant derrière eux une partie non négligeable de la population. Plusieurs manifestations organisées par les militaires ont réuni des milliers de personnes à Bamako. Certes, ces manifestations sont largement encadrées par le pouvoir mais elles témoignent tout de même d’une certaine adhésion en sa faveur malgré une situation économique catastrophique. Les putschistes ne semblent pas avoir de difficultés pour convaincre que ce ne sont pas eux qui sont responsables des difficultés économiques du pays mais les dirigeants de la France et de la Cédéao qui veulent mettre le Mali à genoux.

Après la décision de mettre fin à la présence des troupes françaises sur le territoire malien, Assimi Goïta a monté d’un cran sa démagogie nationaliste en faisant convoquer le ministre français des Affaires étrangères Jean Yves Le Drian et son fils Thomas par le Pôle économique et financier de Bamako pour être interrogés sur une affaire d’attribution d’un marché de fabrication de passeports maliens à une société française à laquelle serait lié le fils du ministre français. Ce dernier serait soupçonné d’avoir pistonné son fils auprès des autorités maliennes, notamment sous le régime d’IBK.

Même s’il est peu probable que le ministre de Macron se présente devant un juge à Bamako, Assimi Goïta se satisfera d’avoir fait un nouveau coup politique en direction de sa base. Mais les travailleurs ont tout intérêt à ne pas se laisser séduire par ce genre de démagogie ni par la prétendue volonté des militaires de « libérer le Mali ». Assimi Goïta et sa clique ne sont pas nés de la dernière pluie. Ils ont servi sous IBK et l’ont aidé à se maintenir au pouvoir avant de le renverser. Ils veulent rester le plus longtemps possible au pouvoir pour s’enrichir à leur tour. Dans la situation actuelle, ils ont besoin du soutien de la population pour ne pas être balayés à leur tour, mais lorsque les travailleurs et les petits paysans réclameront leur droit à une existence décente, ces mêmes militaires n’hésiteront pas une seconde à leur tirer dessus.