La lutte des enseignants pour l’amélioration de leurs conditions d’existence

27 février 2014

CÔTE D’IVOIRE

L’intersyndicale du secteur éducation-formation qui regroupe une vingtaine de syndicats d’enseignants a déclenché une nouvelle grève d’une semaine depuis le 8 avril. Ils sont à leur sixième grève en sept mois. Ce qui a déclenché cette fois-ci la colère des enseignants, ce sont les coupes sur leur salaire des jours de grève passés, auxquelles s’ajoutent des revendications pécuniaires toujours non satisfaites et les nombreuses provocations du gouvernement.

Parmi ces provocations, il y a celle du ministre de la Fonction Publique, Gnamien Konan, qui non content d’avoir coupé le salaire des jours de grève, a annoncé le 2 avril à la télévision, de façon mensongère, que les instituteurs perçoivent un salaire de 307.000 francs CFA alors qu’il est en réalité de 246.000. Autre provocation du gouvernement : en guise de représailles, des enseignants ont été révoqués de leur poste et d’autres ont été mutés n’importe comment.

Tout cela n’a fait que renforcer le mécontentement déjà existant. En effet, le corps enseignant a des revendications non satisfaites. Elles portent essentiellement sur les arriérés non perçus. Les uns dénoncent le non-respect des avancements automatiques qui doit s’opérer tous les deux ans avec effet financier ; d’autres, le non-respect de la nouvelle grille salariale adoptée depuis 2009. Il y a aussi un reliquat important sur la « bonification indiciaire » au primaire, non réglé, etc.

Des menaces aux actes

Lors de la dernière rencontre des représentants des enseignants avec le Premier ministre, ce dernier leur a clairement signifié que « l’Etat ne peut aller au-delà » de ce qu’il a déjà cédé. Par ailleurs, le ministre de l’Enseignement, jouant le rôle de policier leur a signifié que « ceux qui feront l’objet de trouble à l’ordre public seront mis aux arrêts ».

Liant l’acte à la parole, une dizaine d’enseignants du primaire et du secondaire ont été mis aux arrêts dès le premier jour de grève. Mais grâce à la mobilisation de leurs camarades, la majorité d’entre eux ont été libérés après deux à trois jours de détention. Mais à ce jour, trois instituteurs sont toujours entre les mains de la gendarmerie à Lakota et peut-être d’autres ailleurs.

Le siège du Mouvement des Instituteurs pour la Défense de leurs Droits (Midd), à Abidjan, est assiégé par les gendarmes depuis le 8 avril. Les forces armées sont positionnées aussi dans les enceintes des écoles.

Qui prend les élèves en otage?

Le ministre de l’Education a accusé les enseignants de vouloir « prendre en otage les enfants » dont ils mettraient l’année scolaire en danger. Et le gouvernement, ne prend-il pas en otage les élèves en ne cédant pas aux revendications des enseignants ? Comme le gouvernement n’est pas à une démagogie près, à l’écouter, c’est à cause des tous petits avantages que les enseignants ont réussi à arracher par leur lutte jusque-là que les autres salariés de l’Etat, n’ont eu aucune avancée sur leur salaire. Le disant, le gouvernement espère surtout leur mettre à dos les autres salariés.

Pourtant ce sont ceux qui sont au gouvernement qui roulent carrosse ; ils dépensent des milliards pour équiper les forces armées. Et quand il s’agit de payer les petits salariés de l’Etat qui n’en peuvent plus, alors là, il n’y aurait plus d’argent. Et ce serait les enseignants, les responsables des bas salaires des petits salariés de la fonction publique ? C’est vraiment se moquer des gens !

« Salaire coupé, école coupée »

C’est par ce slogan que les instituteurs ont à nouveau mobilisé leur troupe. En tant que travailleurs, on ne peut être que solidaire de leur lutte. C’est grâce à leur mobilisation qu’ils ont réussi à arracher de petits avantages qu’ils estiment à juste titre être leur droit. C’est encore par la mobilisation qu’ils ont réussi à faire libérer leurs camarades arrêtés.

Les jours qui viennent nous situeront sur la politique que suivra le gouvernement. Ce sera peut-être un durcissement de la répression. D’autant plus, si le mouvement faiblit. A l’inverse, le gouvernement reculera d’autant plus si le mouvement gagne d’autres catégories de salariés. Cet élargissement du mouvement, s’il se produit, ne sera pas le fait des enseignants qui ont plutôt une politique corporatiste. Mais ce sera à cause du fait que les travailleurs, qu’ils soient du privé ou du public, n’arrivent plus à joindre les deux bouts, tellement la vie est devenue chère. Comme chez les enseignants, la colère peut aussi exploser.