Témoignage d’un saigneur d’hévéas

22 novembre 2025

« Depuis 2018 je travaille à la SAPH (Société Africaine de Plantations d’Hévéas) dans la région de Gagnoa. C’est une filiale du groupe SIFCA. Dans ses grandes plantations elle emploie beaucoup d’ouvriers agricoles. Je suis saigneur, mon travail consiste à faire la saignée des arbres à caoutchouc pour en extraire la résine. Nos journées commencent tôt avant le levé du soleil et finissent souvent tard par la collette et la pesée de la résine récoltée.

Au cours du mois de novembre 2023, pendant le travail, j’ai commencé par perdre l’usage des bras. J’ai alerté mes collègues qui m’ont conduit au dispensaire de l’entreprise. Par la suite, la paralysie s’est étendue aussi à mes membres inférieurs. J’ai été victime d’un AVC avec une perte de mobilité des pieds et des bras.

Dès le départ, l’entreprise m’a orienté vers la CNPS pour mes soins. Une fois là-bas, je n’ai eu aucune assistance de la SAPH bien que la maladie soit survenue au cours du travail et que je sois en CDI. Pendant plus d’un an qu’a duré la maladie et la convalescence, mon entreprise ne m’a pas versé de salaire.

Aujourd’hui, après une période de rééducation dans les structures de la CNPS, j’ai retrouvé l’usage de mes membres. J’ai repris le chemin du boulot. Le médecin traitant a conseillé un changement de poste, pour éviter une rechute, mais la direction fait la sourde oreille. Pour le moment donc, je n’ai plus vraiment de poste. Je fais acte de présence, et je suis employé à de petites tâches. Cela se ressent fortement sur mon revenu mensuel. Avant que je tombe malade, mon salaire mensuel de base étais de 75.000 F mais grâce aux primes de rendement j’arrivais à gagner entre 280 et 300 mille francs par mois.

Aujourd’hui quand l’entreprise retire les prêts que j’ai contractés pendant le traitement de mon mal, c’est entre 25 et 50 mille francs que je perçois chaque mois. Après avoir abimé ma santé à faire du rendement, l’entreprise refuse de me donner le minimum pour survivre et me pousse plutôt vers la démission. C’est révoltant ! ».

Cette situation révoltante, ce sont tous les travailleurs qui la vivent, qu’ils soient dans le bâtiment, dans l’industrie ou dans le secteur agricole. Dès qu’un travailleur est usé par l’exploitation et la maladie, il est jeté comme un vieux chiffon !