Éditorial

Vive la lutte des travailleurs de la zone industrielle de Yopougon !

04 novembre 2022

ÉDITORIAL

Le mercredi 12 octobre, les artères d’accès à la zone Industrielle de Yopougon ont été barricadées par les travailleurs en grève dès 4 heures du matin. C’est peut-être la première fois de son histoire que cette zone industrielle, la plus importante du pays, a été ainsi bloquée. Les équipes de nuit à leurs descentes ce matin-là sont venues renforcer les barricades. Les travailleurs revendiquent des augmentations de salaire face à l’augmentation des prix qui les écrase et les réduit un peu plus dans la misère.

La police est venue au secours des capitalistes et a lancé des gaz lacrymogènes. Une vingtaine de travailleurs ont été arrêtés mais cela n’a pas empêché les autres de remettre les barricades dès le lendemain matin.

Certaines entreprises comme Nestlé, Cémoi, Cargill et Sonaco ont pu rouvrir. Par contre, de nombreuses autres sont restées fermées jusqu’au lundi suivant, certaines par décision de leurs propriétaires craignant des débordements.

Ce mouvement de grève depuis longtemps attendu, annonce-t-il d’autres grèves encore plus massives ? En tout cas, même des éboueurs étaient en grève ce jour-là.

Les travailleurs de Yopougon ont montré qu’il était possible d’organiser un mouvement collectif qui dépasse le cadre d’une seule entreprise, d’une corporation ou encore limité à une catégorie de travailleurs.

Pour atteindre cet objectif, des travailleurs s’étaient préparés et ensuite organisés en plusieurs « groupes de mobilisation ». Ainsi, ils avaient sillonné de nombreuses usines de la zone industrielle pour appeler les travailleurs à la mobilisation et à la grève. Cette méthode a montré son efficacité.

Ce qui a manqué à ce mouvement, ce sont des assemblées générales organisées dans chaque entreprise pour décider des revendications, des modalités d’action et l’élection des comités de grève. Ceci, dans l’objectif que les grévistes gardent eux-mêmes démocratiquement le contrôle de leur mouvement. Faute d’une telle initiative, ce sont les organisations syndicales qui ont eu le contrôle et la mainmise sur le mouvement.

Les dirigeants syndicaux, ces « patrons » (c’est ainsi que certains ouvriers les nomment) quand ils ne sont pas eux-mêmes vendus, comme cela est le plus souvent le cas, sont dans tous les cas impuissants devant le patronat.

Encore une fois, dès la première occasion venue, ils ont trahi les travailleurs en grève, dont leurs propres bases syndicales dans les usines, pour des intérêts de boutique, pour gagner la reconnaissance du patronat et du gouvernement. Ces dirigeants syndicaux, tels des caniches, espèrent que ceux-ci leur laisseront ramasser quelques miettes tombées de la table bien garnie.

Depuis longtemps, même quand les affaires des capitalistes étaient encore plus florissantes qu’aujourd’hui, aucune augmentation de salaire n’a été accordée aux travailleurs. Alors, ce n’est pas maintenant qu’ils sont dans la crise qu’ils vont accepter de nous augmenter sans y être contraints et forcés. Ils défendront au contraire leurs intérêts capitalistes bec et ongles, tel des charognards, avec l’aide de l’État qui est le gardien de leurs intérêts.

Bien sûr, un mouvement de lutte organisé et contrôlé démocratiquement à la base par les grévistes n’est pas facile à mettre en place mais c’est la meilleure garantie pour défendre le plus efficacement nos intérêts face à nos exploiteurs. C’est aussi la meilleure façon de ne pas se laisser trahir par les dirigeants syndicaux qui prétendent agir en notre nom et en même temps de ne pas se laisser embobiner par les manœuvres du patronnât et des politiciens de tout bord.

C’est au travers d’une telle organisation que nous les travailleurs nous pouvons être les maîtres de notre mouvement face au patronat qui nous exploite et au gouvernement qui nous opprime.