Mali : Assimi Goïta renforce sa dictature et prolonge sa « transition »

10 mars 2024

Au début du mois de juin 2022, Assimi Goïta le chef de la junte au pouvoir depuis le coup d’État d’août 2020, avait officiellement annoncé qu’il partirait au bout d’une période transitoire de 24 mois à compter du 26 mars 2022. Mais, plus la date butoir approche, plus il montre à ses éventuels concurrents qu’il n’est pas prêt à leur laisser son fauteuil. Du coup, ceux qui avaient cru à ses paroles et qui se voyaient déjà trôner à sa place, ne peuvent qu’être surpris et déçus.

Les partisans de l’imam Dicko, regroupés au sein de la CMAS (Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’imam Mahmoud Dicko) font partie de ces déçus-là, mais ils sont loin d’être les seuls puisqu’ils avaient fait une coalition avec une trentaine de partis et formations  d’opposition baptisée « Synergie d’action pour le Mali ».

Le point commun de tous ces gens-là était et est jusqu’à nouvel ordre, de vouloir gouverner ensemble en prenant, disent-ils, « une autre voie » que celle des militaires. Ils attendaient comme des niais que la junte leur apporte les clés du palais de Koulouba pour qu’ils s’y installent. Mais c’est mal connaître Goïta ainsi que l’histoire de nombreux coups d’État qui ont eu lieu dans ce pays depuis son indépendance. Les militaires ont pris cinq fois le pouvoir et ils ne l’ont quitté que contraints et forcés par d’autres coups d’État. Assimi Goïta n’a rien d’une exception dans cette lignée de galonnés assoiffés de pouvoir.

Rappelons que lorsque la junte actuelle a pris le pouvoir, l’imam Dicko et les dirigeants des mouvements qui sont autour de lui, étaient les premiers à applaudir les galonnés et à les remercier d’avoir mis fin les au régime corrompu de l’ancien président IBK. Mais Assimi Goïta n’a pas pris le pouvoir pour leur faire plaisir et le leur laisser ensuite !

Depuis quelque temps, Dicko et son mouvement ne sont plus en odeur de sainteté avec le pouvoir de Goïta. Celui-ci cherche à les bâillonner et ne veut surtout pas que la CMAS devienne le point d’encrage  de la contestation sociale en cette période de pénurie, de vie chère et d’insécurité qui génèrent de plus en plus de mécontentement au sein de la population. C’est ainsi que la CMAS a été dissoute depuis le 6 mars 2024 tandis que l’imam Dicko est coincé en Algérie depuis décembre 2023 et ne peut pas rentrer à Bamako car le gouvernement malien l’accuse de mener une « activité subversive » et d’être une « menace pour la sécurité publique ».

Aissimi Goïta fait aussi le ménage au sein de l’armée pour éviter l’émergence d’éventuels concurrents dans ses propres rangs. Au début de ce mois de mars, il a fait arrêter le colonel Alpha Yaya Sangaré parce que celui-ci a osé confirmer un rapport  de Human Rights Watch (une ONG de défense des droits humains) accusant l’armée malienne de graves exactions telles que des tortures lors d’interrogatoires.

Quelques mois plus tôt, c’est un animateur de radio, Ras Bath, qui a été arrêté pour diffamation. Puis, ce fut le tour de  l’ « influenceuse » Rokia Doumbia d’être condamnée à un an de prison pour avoir critiqué sur le réseau Internet, l’incapacité du régime de lutter contre l’insécurité et contre la vie chère.

Ce qui est sûr c’est que les travailleurs n’ont aucune raison de faire confiance ni aux galonnés, ni à ceux qui se cachent derrière le boubou de l’imam Dicko pour obtenir des améliorations de leurs conditions d’existence. Les seules améliorations qu’ils peuvent espérer sont celles qu’ils imposeront eux-mêmes par leurs luttes face à l’État et au patronat.